Jeune & Pro #1 / François Déalle-Facquez / Marine Gueguen

Par Le 31/05/2016

Jeunes et pros 1

Entre l'image donnée d'un métier lors de ses études et ses stages, & le réel tantôt mieux, tantôt désillusionné, d'une expérience de travail qu'ils s'approprient au jour le jour, il y a parfois un monde.

Un monde, fait de décalages – éventuels, mais pas vrais pour tout le monde – qu'explorent pour nous 11 (jeunes) professionnels, qui évoqueront, dans une série d'articles tout au long de l'année 2016 sur notre blog, leur toute relative mais émergente expérience.

De quoi découvrir les impressions et les idées de jeunes urbanistes, d'architectes, de géograpghes-cartographes et professionnels de l'environnement sur leur métier et leur expertise acquise au gré d'une à sept années d'expérience. Marine Gueguen, chargée d'études planification à l'Adeupa, François Déalle-Facquez, urbaniste associé au sein de l'agence Ville Ouverte, deux grands passionnés de leur métier, nous parlent tour à tour de leurs expériences.

 

Francois dealle

François Déalle-Facquez

urbaniste associé chez Ville Ouverte

Photo_JeuneetPro1

Marine Gueguen 

chargée d'études planification chez Adeupa, ag. d'urba. Brest-Bretagne

Avec cette interview, tout commence par un retour en arrière. Quelle était l'image que tu te faisais du métier d'urbaniste, au cours de tes études ? Et le réel de ton métier aujourd'hui ?

C'est très intéressant d'essayer de faire cet exercice aujourd'hui, cinq ans après mon diplôme. Car même s'il y a un avant et un après l'entrée dans la vie professionnelle, je ressens plutôt une maturation permanente de ma vision et de mon positionnement dans le métier.

L'urbanisme tel qu'il est enseigné, même en parcours professionnel, reste très marqué par la recherche : j'étais donc plus attiré par l'aspect théorique, par les notions.

Aujourd'hui j'apprécie ce bagage, mais au quotidien je mobilise plutôt l'expertise des outils tout en gardant de la transversalité entre acteurs. Dans la pratique, il y a également le nombre de missions menées simultanément ou encore la prise de responsabilité qui sont des choses que l'on n'apprend pas avant de commencer à exercer.

Avant ma dernière année de Master, mon image du métier d’urbaniste était assez floue! A l’époque, étudier la ville et les territoires me plaisait, j’avais également une véritable attirance pour l’aménagement des interfaces ville-port. Je me suis laissée guider par mes envies…

Une année en ERASMUS en Finlande en fin de master 1 a fait émerger ma passion pour l’urbanisme, ce n’est donc qu’en master 2 que je me suis spécialisée en urbanisme.

La réalisation d’un seul stage à la fin de mon parcours professionnel ne m’a certainement pas aidée à mieux connaître les métiers de l’aménagement. Avec du recul, je pense qu’il est très important de réaliser des stages dès la licence, j’ai eu la chance de ne pas me tromper dans mon choix, mais ce n’est pas toujours le cas.

Du coup, y a-t-il un lien entre ton parcours de formation et ton métier ? Ta formation te sert-elle aujourd'hui dans l'exercice et l'acquisition progressive de tes missions ? Que penses-tu apporter de par ta formation, au sein de ton entreprise ?

Ma formation à l'IUAR d'Aix-en-Provence m'a clairement permis d'acquérir des repères et un socle théoriques. C'est une période riche en rencontres décisives, avec des enseignants comme Jean-Noël Consales ou Aurélien Delpirou avec qui je suis toujours en contact aujourd'hui.

Lors de mes études j'ai également fait certains choix, comme celui de travailler en bureau d'études, en assistance à maîtrise d'ouvrage, et développé certaines sensibilités.

C'est notamment ces sensibilités que j'ai essayé de mettre à profit dans mon entreprise, notamment depuis que je suis devenu associé en 2013. Je me suis par exemple investi sur les questions d'agriculture urbaine, au niveau de la veille pour l'agence (http://www.scoop.it/t/veille-en-urbanisme-vo), dans le questionnement de nos modes de représentations graphiques, etc.

Étant géographe de formation, j’ai gardé dans ma pratique quotidienne cet attachement au territoire (en particulier à l’espace maritime) et la capacité à intégrer les changements d’échelle. Ma dernière année d’étude m’a également confortée dans mon goût pour le travail d’équipe, la diplomatie et l’aspect transversal du métier.

Je travaille aujourd’hui dans la planification (réalisation de documents d’urbanisme) en milieu littoral. Lors de mes études je n’avais jamais imaginé être à ce poste, mais aujourd’hui c’est un métier qui me correspond et m’anime au quotidien.

Quel est le quotidien de ton travail... et des imprévus qui vont avec ? Tu peux nous parler un peu des missions que tu es amené à effectuer ? Des obstacles principaux que tu as été amené à franchir de par l'exercice de ton métier ? 

J'ai habituellement entre cinq et dix missions actives, quasi exclusivement des missions pour des maîtrises d'ouvrages publiques.

Chacune avec des degrés de responsabilité différents au sein de l'agence, avec différents partenaires. Je réalise par exemple en ce moment un PLUi près d'Amiens, interviens en concertation dans différentes missions (lors d'ateliers en table-ronde, lors de marches commentées, lors de réunions publiques), travaille sur un projet préopérationnel avec une jeune agence d'architectes, Detroit, à Saint-Nazaire, etc.

La diversité des contextes, des projets et des rencontres est la principale source de motivation et d'épanouissement. Mais aussi de stress, avec des délais à tenir, des réunions à animer, etc. L'expérience, par exemple lors des présentations orales, me permet aujourd'hui de prendre plus de plaisir et d'être de plus en plus satisfait.

Une du journal de Malakoff, où j'apparais à l'occasion d'une concertation publique réalisée pour la Ville !

Francois dealle malakoff

J’ai l’habitude d’expliquer aux néophytes que « j’accompagne les élus dans la définition de leur projet d’aménagement », je suis chef de projet pour la révision du Schéma de cohérence territorial (SCoT) du pays de Brest (89 communes).

De la mise en place de la gouvernance à l’écriture du document, en passant par l’organisation des séminaires, les nombreuses réunions d’équipe ou la recherche du compromis avec les élus, mon quotidien est intense et très diversifié.

La multitude d’acteurs ne me facilite pas la tâche et nécessite une grande organisation. Mon quotidien me plaît, le principal obstacle c’est l’évolution quasi permanente du code de l’urbanisme qui nous amène à mener des réalisations de documents d’urbanisme dans des délais relativement courts !

Atelier marinegueguenPhotographies prises lors d'un atelier en planification où j'intervenaisAtelier marinegueguen2

  • En quoi la pratique (les pratiques) de ton métier a (ont) fait évoluer ta perception du métier d'urbaniste, et tes compétences en tant que tel ?

Il me semble que ma perception du métier évolue tous les jours, je suis parfois déçu, à cause de missions qui n'aboutissent pas aux résultats escomptés, mais le plus souvent je découvre et comprends modestement le sens profond de notre métier. Mes compétences, la maîtrise des documents et des méthodes ou encore le fait de pouvoir se positionner dans les débats sur la ville, n'ont d'intérêt que lorsqu'on les remet en perspective, qu'on parvient à revenir à l'essence même de notre profession.

La planification est une spécialisation qui ne rencontre pas un franc succès chez les jeunes diplômés, moi-même j’en avais une image peu positive. Et pourtant, les documents d'urbanisme sont des outils essentiels permettant de définir et d’encadrer la stratégie de développement et d'aménagement des territoires. C’est une préalable indispensable à la réalisation opérations de construction et d'aménagement.

Je me rends compte également qu’un urbaniste doit absolument maîtriser les bases de la gestion de projet, il serait intéressant que les formations offrent des connaissances sur ce point.

Retour vers le futur. Comment envisages-tu ton avenir professionnel ? Quel bilan et quelles perspectives retires-tu de ta toute relative expérience ? Ta vision a-t-elle évolué ou retour à l'idée de départ ?

J'aimerais maintenir ma pratique professionnelle entre deux dynamiques qui me semblent complémentaires.

D'une part accumuler des expériences, une maîtrise et une connaissance du métier. D'autre part se remettre en question, échanger en dehors du cadre professionnel, voire même de l'urbanisme.

Je m'implique pour cela dans différents projets et essaie actuellement de lancer, avec des amies Maryne et Marie-Cécile, Sur-Mesure (https://www.facebook.com/RevueSurMesure/), une revue web ouverte dont l'objectif est justement d'essayer de croiser les regards.

Ces quelques années d’expériences (7 ans) me confortent dans ma passion pour l’urbanisme, la planification est une spécialisation très riche mais énergivore !

Dans le futur, quand la révision du SCoT sera terminée j’aimerai revenir à ma première passion « la gestion de l’interface ville-port », je prendrai du temps en interne pour m’impliquer dans des projets urbains portuaires.

J’aimerais également donner des cours à l’université pour donner envie aux urbanistes en herbe de se lancer dans la planification.


 

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Marine Gueguen

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Adeupa, Agence d'urbanisme Brest-Bretagne

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